
Georg Baselitz
Cahiers d'Art est fier d'annoncer une exposition d'estampes du célèbre artiste allemand Georg Baselitz, présentant une sélection remarquable de 1994 à 2020. Cette exposition offre une occasion rare de découvrir la maîtrise de la gravure de Baselitz, notamment la série Belle Haleine , comprenant trois œuvres de grande taille qui ont rarement été exposées depuis leur création il y a plus de 20 ans.
Georg Baselitz : Maîtrise de la gravure
Dans notre espace d'exposition du 14 rue du Dragon, nous présentons le clou de l'exposition : trois œuvres de la série Belle Haleine , une suite monumentale de dix estampes provocantes, considérées comme les plus grandes linogravures jamais réalisées par Baselitz. Chaque estampe, mesurant plus de deux mètres de haut, représente des couples partiellement vêtus en train de copuler, leurs silhouettes inspirées de lithographies érotiques du XIXe siècle. Fidèle à son style, Baselitz inverse les figures, perturbant toute narration directe et déplaçant l'attention du spectateur vers l'acte même de la marque. Cette inversion, technique employée par Baselitz depuis 1969, résiste à toute interprétation littérale et favorise une approche plus abstraite de l'œuvre.
Le titre Belle Haleine fait directement référence à l'emblématique ready-made de Marcel Duchamp , Belle Haleine , Eau de Voilette, conçu en 1920 avec l'aide de Man Ray. L'œuvre de Duchamp consistait en un flacon de parfum dont l'étiquette modifiée représentait son alter ego féminin, Rrose Sélavy – un jeu de mots ludique avec « Éros, c'est la vie ». Baselitz poursuit ce thème de l'érotisme et de l'humour, s'appuyant sur l'irrévérence de Duchamp tout en repoussant les limites de la gravure avec ses linogravures colossales. Cette exposition offre une occasion rare de voir trois de ces estampes réunies, soulignant le dialogue permanent de Baselitz avec l'histoire de l'art et son exploration de thèmes provocateurs et conflictuels.
La gravure de Georg Baselitz est un prolongement essentiel de sa pratique artistique plus large, qui englobe la peinture, la sculpture et le dessin. Ses estampes, qu'elles soient réalisées en gravure sur bois, à l'aquatinte, à la pointe sèche ou en linogravure, témoignent d'un rapport direct et physique avec le médium, soulignant à la fois le processus et la matérialité de l'œuvre.
La gravure sur bois occupe une place particulière dans l'œuvre de Baselitz. Cette technique séculaire, profondément ancrée dans l'histoire de l'art allemand, de Dürer aux expressionnistes, permet à Baselitz d'aborder directement la matérialité brute de son art. L'énergie brute, presque primitive, de ces œuvres révèle l'attachement de Baselitz à la crudité du procédé, tandis que son inversion des figures bouleverse les lectures traditionnelles de l'image.
Contrastant avec l'audace et le graphisme de ses gravures sur bois, les aquatintes de Baselitz révèlent une facette différente de sa technique d'estampe. L'aquatinte, qui consiste à graver sur des plaques de métal, permet une plus grande subtilité et une variation tonale accrue. Dans ces œuvres, Baselitz explore des contrastes d'ombre et de lumière plus doux et plus nuancés, tout en préservant la puissance expressive de son sujet. Les surfaces finement travaillées de ces estampes capturent une gamme de textures – des noirs veloutés aux gris translucides – offrant un regard plus intime et contemplatif sur ses thèmes récurrents. Même dans cette forme plus calme et plus subtile, les aquatintes de Baselitz conservent l'intensité émotionnelle et l'abstraction provocatrice qui caractérisent son œuvre.
Les estampes de Baselitz reflètent les mêmes préoccupations artistiques que ses peintures et sculptures : l’interrogation de la mémoire historique, la tension entre figuration et abstraction, et la redéfinition constante de la forme humaine. Ses estampes invitent le spectateur à s’intéresser non seulement à l’imagerie, mais aussi à la matérialité du médium – comment chaque coupe, trait ou lavis d’encre témoigne de l’acte de création.








